Tentative de putsch en Turquie : vague d`arrestations dans l`armée

  16 Juillet 2016    Lu: 1784
Tentative de putsch en Turquie : vague d`arrestations dans l`armée
Une partie de l`armée hostile au président Erdogan a tenté un coup d`Etat vendredi soir. 60 personnes au moins sont mortes dans les affrontements entre putschistes et loyalistes, et 336 autres ont été arrêtées par le régime.
Le pouvoir vacille en Turquie. Vendredi soir vers 22 heures 30 heure française, une partie de l`armée hostile à Erdogan a investi le siège de la télévision publique turque pour diffuser un communiqué. Un message à la teneur sans équivoque, dans lequel les putschistes annoncent qu`ils prennent le pouvoir de force. Le communiqué, également publié sur le site de l`état-major des armées, précise que si le couvre-feu et la loi martiale sont décrétés, les relations internationales et l`état de droit sont maintenus dans le pays. Dans la foulée, le Premier ministre Yildirim a réagi en expliquant que "certains individus avaient entrepris une action illégale sans l`aval de la chaîne de commandement" et que les forces de sécurité faisaient le nécessaire pour un retour à la normale. Mais la situation reste floue.

ERDOGAN DE RETOUR, LE GOUVERNEMENT SEMBLE PRENDRE LE DESSUS

Peu après que les deux camps aient annoncé avoir le contrôle de la situation, des affrontements ont éclaté à Istanbul et Ankara. Le Parlement a été bombardé dans la capitale turque, où au moins 17 policiers fidèles au régime ont été tués. Dans le même temps, un hélicoptère putschiste a été abattu par l`aviation turque, qui a fermé l`espace aérien au-dessus de la ville. Si la situation semble tendue à Ankara, la tension semble retomber quelque peu à Istanbul. Vers 2 heures 30 heure française, les militaires putschistes, qui auraient tiré sur la foule peu avant, ont finalement déposé les armes. Mais le bilan est lourd, au moins 60 personnes auraient été tuées dont 42 rien qu`à Ankara selon les premiers bilans. Le régime tente d`étouffer la fronde de l`armée, le ministre de la Justice a déjà annoncé l`arrestation de 336 personnes après la tentative de coup d`état.

Le gouvernement semble donc reprendre la main, le symbole de ce retour relatif à la normale étant le retour d`Erdogan, parti en vacances près de Bodrum, à Istanbul. Son avion a atterri à l`aéroport Atatürk, où il a été accueilli par ses partisans. Et pour cause, peu avant d`entamer son vol, le chef de l`Etat turc a pris la parole à la télévision dans des conditions surréalistes, appelant la population à sortir dans les rues pour défendre la démocratie.

Le chef de l`Etat était interrogé par un journaliste de CNN-Turk via un téléphone portable. Ses propos ont été diffusés en direct sur la chaîne de télévision.

Selon plusieurs témoignages sur Twitter, des milliers de partisans d`Erdogan sortent dans la rue et crient Allahu Akbar. Dans plusieurs endroits, ils semblent même avoir réussi à faire reculer les militaires.

QUI SONT LES PUTSCHISTES ET QUI EST LE COMMANDITAIRE ?

Difficile de déterminer l`identité des putschistes qui se sont lancés dans cette tentative de coup d`état vendredi soir. Selon l`agence Anadolu, le groupe serait mené par 37 officiers de la gendarmerie et de l`armée de l`air.

Il pourrait s`agir d`officiers partisans d`une Turquie kémaliste, donc laïque, à l`opposé du modèle de société prôné par l`AKP, le parti d`Erdogan. Depuis son accession au pouvoir en 2002, ce dernier a justement tenté de remplacer les élites militaires par des officiers qui le soutiennent. C`est la raison pour laquelle les putschistes auraient pris en otage le chef d`état-major des armées, Hulusi Akar.

Selon l`agence pro-gouvernementale Anatolie, il est "retenu en otage par un groupe de militaires qui tentent un soulèvement", a précisé l`agence citant des "sources crédibles". A peine arrivé à l`aéroport Atatürk d`Istanbul, Erdogan en a profité pour annoncer qu`il allait "nettoyer l`armée", poursuivant ainsi sa politique de renouvellement des effectifs militaires.

Lors de cette conférence de presse improvisée, le président turc a également expliqué que sa résidence de vacances avait été bombardée avant de pointer du doigt son adversaire politique Fethullah Gülen, leader d`un mouvement très populaire en Turquie. Selon Erdogan, il serait l`instigateur de cette "trahison". Ce n`est pas la première fois que le chef de l`Etat accuse Gülen de vouloir déstabiliser le régime. En 2007 et 2010, il l`avait déjà désigné comme le responsable des tentatives de complots à son encontre.

QUELLE EST LA SITUATION À ANKARA ET ISTANBUL ?

Le Parlement turc, dans la capitale Ankara, a donc été bombardé selon l`agence de presse pro-gouvernementale Anatolie. L`agence n`a pas fourni de précisions, mais des correspondants de l`AFP ont entendu une violente explosion suivie de rafales de tirs.

Des avions et hélicoptères militaires turcs ont été entendus volant à basse altitude au-dessus d`Ankara, où des coups de feu auraient également retenti. Il y aurait plusieurs blessés et 17 policiers tués à Ankara. Par ailleurs, des avions de chasse F-16 de l`aviation turque ont abattu un hélicoptère Sikorsky appartenant aux putschistes dans une ville qui n`a pas été précisée mais qui pourrait être la capitale, Ankara.

A Istanbul, les forces de sécurité ont également partiellement interrompu la circulation automobile sur les ponts traversant le Bosphore, dans le sens Asie-Europe. NTV a également montré les images de chars à l`entrée de l`aéroport d`Istanbul-Atatürk, où tous les vols ont été annulés. Des tirs ont également été entendus, l`armée aurait tiré sur la foule. Des grandes artères menant notamment à la place Taksim étaient bloquées par les forces de l`ordre et la présence policière était importante dans les rues. De son côté, la population s`est ruée dans les magasins et sur les distributeurs de billets. Une ambiance d`état de siège, en prévision d`une possible période où les Stambouliotes devraient rester calfeutrés chez eux.

LES RÉACTIONS DE LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE

Le ministère français des Affaires étrangères a demandé à ses ressortissants en Turquie de ne pas sortir de chez eux pour raison de sécurité. "Un message a été envoyé aux personnes en déplacement via le dispositif Ariane et via l`ambassade pour les personnes installées dans le pays disant que des événements graves sont en train de se dérouler à Istanbul et Ankara", a dit une source diplomatique française.

Barack Obama a exhorté vendredi toutes les parties en Turquie à soutenir le gouvernement turc "démocratiquement élu" du président Recep Tayyip Erdogan, selon un communiqué de la Maison-Blanche. Le président américain aussi appelé à "faire preuve de retenue et éviter violence ou bain de sang". Même son de cloche du côté d`Angela Merkel. "L`ordre démocratique doit être respecté en Turquie", a indiqué le porte-parole de la chancelière allemande, Steffen Seibert, sur son compte Twitter. "Tout doit être fait pour protéger les vies humaines",


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