Les banques italiennes secouées après le `non` au référendum

  07 Décembre 2016    Lu: 717
Les banques italiennes secouées après le `non` au référendum
De Monte dei Paschi à Unicredit, les banques italiennes, qui ploient sous les créances douteuses, ont accusé le coup du revers de Matteo Renzi en Bourse. La recapitalisation des deux établissements pourrait en être sérieusement gênée. Un article de notre partenaire La Tribune.

Le « no » cinglant des Italiens était attendu, mais il a été plutôt mal encaissé par les marchés. L’incertitude politique créée par la démission du chef du gouvernement Matteo Renzi a logiquement pesé sur les valeurs bancaires, déjà malmenées depuis le début de l’année : l’action de la banque Monte dei Paschi di Siena a chuté de près de 10 % dans la journée, et a clôturé sur une perte de 4 %, creusant à plus de 86 % son recul annuel. Unicredit a dévissé de 6 % (un peu plus de 3 % en fin de séance). Même Intesa, réputée plus solide, a cédé 5 % à l’ouverture et 1,5 % en clôture.

La plus affaiblie est la Toscane Monte dei Paschi, la plus ancienne banque commerciale au monde et la plus vulnérable en Europe, au regard des derniers tests de résistance : elle doit impérativement mener une vaste augmentation de capital de 5 milliards d’euros avant la fin du mois pour se remettre à flot. La crise gouvernementale risque de mettre en péril cette opération urgente.

Un bail-out de Monte dei Paschi ?

Si les banques d’investissement qui envisageaient de participer à l’augmentation de capital renoncent au vu des conditions de marché, l’État italien devra probablement intervenir. Ce qui est d’ores et déjà envisagé par la Banque centrale européenne. Ewald Nowotny, membre du conseil des gouverneurs de la BCE, a ainsi déclaré ce lundi : « La différence entre l’Italie et d’autres États comme l’Allemagne ou l’Autriche c’est qu’en Italie il n’y a pas eu à ce jour d’aide publique significative ou de nationalisation de banques. On ne peut donc pas exclure qu’il soit nécessaire pour l’État de prendre des participations [dans des banques] d’une manière ou d’une autre ».

La troisième banque du pays tiendra un conseil d’administration ce mardi pour évaluer si l’augmentation de capital pourra bien avoir lieu ou s’il faut s’orienter ver un plan B, comme « bail-out » (renflouement par l’État). Quel responsable politique oserait-il assumer la faillite de cette institution, symbole de la finance italienne et moteur économique de la région de Sienne ?

Les investisseurs s’inquiètent aussi pour Unicredit, la première banque italienne par l’actif, qui doit présenter sa stratégie le 13 décembre et vraisemblablement une augmentation de capital de 10 à 13 milliards d’euros, dont une opération de conversion d’obligations, comme Monte dei Paschi. Son directeur général a déclaré à l’agence Bloomberg ce lundi que le référendum ne changeait rien à ses plans.

Le mal italien : les créances douteuses

Banca Monte dei Paschi (BMPS) est emblématique du mal frappant tout le système bancaire italien, fragile, car ployant sous les créances douteuses, qui ont triplé en moins de dix ans, et souffrant de sous-capitalisation. Même Intesa Sanpaolo, considérée comme la plus solide, pourrait être touchée par les effets de ricochet des recapitalisations des autres acteurs plus faibles de ce secteur fragmenté.

Les créances douteuses des banques italiennes, pudiquement appelées « prêts non-performants », représentent 19 % du PIB italien : elles s’élevaient à 356 milliards d’euros à fin juin selon la Banque d’Italie (en baisse de 4 milliards), dont 198,9 milliards de créances irrécouvrables (« sofferenze »).

La valeur à la vente de ces créances « pourries » serait plus que moitié moindre, de l’ordre de 85 milliards d’euros selon la banque centrale italienne, soit 42 % de la valeur brute comptable.

Dans son rapport sur le mécanisme d’alerte il y a quinze jours, la Commission européenne dressait un panorama inquiétant de la situation italienne : « La faible rentabilité et le stock élevé de prêts non-performants rendent le système bancaire [italien, ndlr] de plus en plus vulnérable et pèsent sur la capacité des banques à soutenir l’économie. »

La BCE a précisé dans ses dernières statistiques de surveillance bancaire que les 14 grandes banques italiennes qu’elle supervise détiennent près des deux tiers de toutes les créances douteuses de la zone euro, soit 286 milliards sur 990 milliards d’euros à fin juin.

UniCredit détient encore plus de 76 milliards d’euros de créances douteuses au bilan. Elle a procédé à des cessions, en envisage d’autres et vient d’annoncer l’ouverture de négociations exclusives avec le français Amundi (Crédit Agricole) en vue de lui vendre Pioneer, sa filiale de gestion d’actifs, pour un montant estimé à 3,5 milliards d’euros.

D’autres opérations sont en suspens après le référendum. De petites banques vont être contraintes de se rapprocher. Le fonds de sauvetage Atlante doit ainsi racheter 2,5 milliards d’euros de prêts douteux détenus par Banca Etruria, Banca Marche et CariChieti, ce qui pourrait être le préalable à leur rachat par la cinquième banque italienne, UBI Banca.

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