C'est un redoutable tueur. Le cancer du pancréas est l'un des plus meurtriers de tous, avec des taux de survie très faibles, de 8% à cinq ans pour les hommes et de 7% pour les femmes, selon les dernières données de l'Institut national du cancer. Et surtout, le nombre de malades ne cesse d'augmenter.
"Cette année, les décès par cancer du pancréas devraient même pour la première fois dépasser ceux causés par les cancers du sein, alors que cette pathologie touche un nombre beaucoup plus important de patients", souligne le professeur Daniel Jaeck, qui organisait le 14 mars un colloque à l'Académie de médecine sur le sujet. D'ici à 2030, le cancer du pancréas pourrait causer à lui seul jusqu'à 15 000 décès par an en France.
Un peu d'espoir aux malades
Mais ce qui inquiète le plus les médecins, c'est qu'ils ne savent toujours pas pourquoi cette maladie est de plus en plus fréquente, particulièrement dans les pays les plus développés. Parmi les facteurs de risque souvent évoqués: le tabac, l'alcool, l'obésité et, pour une faible part, la génétique. Mais ces différentes causes ne semblent expliquer qu'environ la moitié des cas constatés. Pour le reste? Mystère, même si des recherches sont en cours. Difficile, dans ces conditions, de faire de la prévention.
D'où l'intérêt d'améliorer les traitements. On a enregistré de remarquables progrès ces cinq dernières années, qui devraient redonner un peu d'espoir aux malades.
Dans l'imagerie, d'abord, qui permet d'affiner le diagnostic et de toujours mieux sélectionner ceux chez qui une opération chirurgicale a des chances d'aboutir. Elle est en effet nécessaire pour espérer guérir, mais n'est possible que pour 10% à 15% des patients au plus, car cette maladie est souvent découverte à des stades trop avancés.
Ces dernières années, une avancée très importante a été faite, l'introduction d'une chimiothérapie en première intention, avant toute intervention chirurgicale: ce traitement permet de diminuer la taille de la tumeur et de rendre "opérables" des malades considérés jusque là comme incurables.
Centres spécialisés
Dans tous les cas, bien choisir l'hôpital où l'on se fait traiter est essentiel. Selon des données présentées par le Pr Pascal Hammel, de l'hôpital Beaujon à Clichy, le taux de mortalité post-opératoire varie en effet de 3%... à 15% selon les centres.
Principale explication avancée à ces variations: le nombre d'opérations réalisées dans l'année par les chirurgiens. Plus ils pratiquent, plus le taux de mortalité est faible. Et cet "effet volume" joue aussi sur le taux de survie à long terme des malades, qui est plus élevé dans les hôpitaux les plus actifs.
Ne faudrait-il pas, dès lors, orienter clairement les malades vers des hôpitaux hautement spécialisés, voire labellisés? Le débat court dans la communauté médicale depuis plusieurs années. Aux Etats-Unis il existe depuis déjà plus de 20 ans des seuils minimaux d'activité spécifiques au cancer du pancréas en dessous desquels les établissements ne peuvent plus prendre en charge de patients. Cette mesure a été mise en oeuvre plus récemment en Hollande, en Italie ou au Royaume-Uni.
En France, jusqu'à présent, ce seuil n'existe pas. "La définition d'un centre à haut volume n'est pas consensuelle. Toutefois des études européennes suggèrent que 20 à 25 interventions serait un chiffre pertinent", a précisé le Pr Alain Sauvanet, chirurgien à l'hôpital Beaujon. La situation pourrait évoluer d'ici à l'année prochaine, car le ministère de la santé travaille à la définition de nouvelles règles pour la prise en charge des cancers.
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