"C'était un plaisir de rencontrer le Premier ministre (Alexis) Tsipras à Davos aujourd'hui, je l'ai félicité sur les progrès" de son pays, remarquait jeudi Christine Lagarde, directrice générale du Fonds monétaire international (FMI).
Le ton des créanciers de la Grèce s'est considérablement adouci depuis l'élection de M. Tsipras en janvier 2015 sur un programme de gauche radicale, hostile aux deux plans de prêts, argent contre réformes, imposés au pays depuis 2010 par l'UE et le FMI.
Contraint en juillet suivant d'en signer un troisième encore plus dur, il l'a finalement mené tambour battant, s'appuyant sur une majorité parlementaire courte mais fidèle pour enchaîner des réformes difficiles, face à une rue de plus en plus désabusée.
La Grèce espère en terminer avec ces plans au mois d'août.
La troisième "revue" de l'actuel programme, censée permettre le versement à la Grèce de 6,7 milliards d'euros de février à avril, aura même été "l'une des plus rapides depuis le début de la saga des plans de sauvetage", relèvent les économistes de Citi.
- 'Plus en mode de crise' -
Pour empocher la totalité de ces fonds, le gouvernement devra encore démontrer son efficacité dans la mise en œuvre du nouveau système de vente aux enchères par internet des biens des Grecs endettés. Un système conçu pour soulager les banques de leurs créances douteuses, tout en mettant fin à l'irruption de manifestants sur les lieux de vente.
Avec de telles mesures, le Syriza de M. Tsipras est actuellement donné perdant par tous les sondages face à Nouvelle Démocratie (droite conservatrice) aux prochaines élections, prévues à l'automne 2019.
Mais aujourd'hui, la Grèce "n'est plus en mode de crise", soulignait lundi Klaus Regling, directeur général du Mécanisme européen de stabilité (MES), après une réunion des ministres des Finances de l'Eurogroupe.
Et elle espère enfin entamer des négociations sur la réduction de sa dette (178% du PIB en 2017).
Elle a connu en 2017 sa première vraie croissance depuis neuf ans, autour de 1,3%, avant au moins 2% cette année et les suivantes, prédisent les économistes.
Le chômage, toujours le pire d'Europe, s'est néanmoins réduit à 20,5% en 2017, contre un pic à 27,9% en 2013, observe S&P Global Ratings, qui vient de relever la note de la Grèce à B avec perspective positive.
Le lancement en juillet d'une obligation de trois milliards d'euros sur cinq ans et un swap sur 30 mds d'euros d'obligations en novembre ont été des succès. Un nouveau test pourrait avoir lieu en février, estiment les spécialistes, avant le retour obligé aux marchés en août, en fin de programme.
- Après le tsunami -
Mais d'autres indicateurs restent ternes. Ainsi la consommation du troisième trimestre 2017 a baissé de 1% sur un an, et l'investissement de 8,5%.
Dimitris Bibas, économiste à la Confédération des petites et moyennes entreprises (GSEVEE) reconnaît "une légère amélioration, au moins une stabilisation" pour les ménages récemment.
Mais "il y en a encore plus de 35% des gens sous le seuil de pauvreté", fréquemment obligés d'accepter des salaires inférieurs à 500 euros.
La moitié des Grecs vivent aussi d'une pension de retraite, la leur ou celle d'un parent, et 40% des ménages repoussent leurs visites chez le médecin pour raisons financières.
Conséquence, sept jeunes sur dix âgés de 18 à 35 ans rêvent de partir à l'étranger, selon une étude invoquée par M. Bibas. "C'est énorme", soupire-t-il.
Cette fin de crise, "c'est comme quand l'eau se retire après un tsunami, on est confronté aux conséquences". Il préconise une vigoureuse politique d'investissements et un "assouplissement" du carcan budgétaire prévu pour encore quelques années après la fin du plan.
"Sans quoi, affirme-t-il, l'économie grecque restera au niveau de la survie, pas du développement".
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