Herbert Diess, qui dirigeait jusqu'ici la seule marque VW, prend les rênes d'une entreprise qui vit une interminable crise depuis qu'elle a admis en 2015 avoir trafiqué 11 millions de ses voitures diesel pour masquer le niveau réel de leurs émissions d'oxydes d'azote (NOx), un gaz associé à des troubles respiratoires et cardiovasculaires.
Sa mission, a-t-il dit dans un communiqué jeudi soir, est de réorganiser l'entreprise aux 12 marques, alors qu'elle est face à "une période de profond bouleversement". Une conférence de presse de dirigeants de l'entreprise est prévue à Wolfsburg, siège du groupe, à 08H30 GMT.
Un "tueur de coûts"
Véhicules électriques ou hybrides, numérisation, nouveaux services de mobilité : M. Diess, qui a la réputation d'un "tueur de coûts", doit organiser ces virages, alors que l'avenir du diesel, longtemps produit stratégique, semble compromis.
Malgré le coût faramineux du scandale des émissions polluantes --jusqu'ici 25 milliards d'euros -- Diess peut s'appuyer sur la bonne santé du groupe qui a réussi à rester en 2017 numéro 1 mondial devant le japonais Toyota. Avec 11,35 milliards d'euros, le bénéfice net du groupe a en effet plus que doublé en 2017 par rapport aux 5,4 milliards d'euros de 2016. L'année du scandale, le groupe avait connu une perte inédite d'1,6 milliard d'euros en raison des lourdes provisions du dieselgate.
Son prédécesseur, Matthias Müller, qui a été officiellement débarqué jeudi mais dont le départ était annoncé par toute la presse allemande depuis des jours, avait déjà entrepris une restructuration massive tournée vers l'électrification et la réduction des dépenses.
Contrairement à Müller, Diess n'a pas fait sa carrière au sein du constructeur de la Golf et n'est donc a priori pas dans le viseur de la justice. Transfuge de BMW, il était en effet arrivé chez VW juste avant que n'éclate le scandale des émissions polluantes.
L'escroquerie a du bon
Il peut aussi se targuer du soutien unanime des actionnaires principaux, les familles héritières Porsche-Piëch. Signe de cette confiance, il devient à la fois chef de la marque VW, du groupe Volkswagen et de la recherche et développement, soit un périmètre encore plus large que celui du "super-patron" qu'était Martin Winterkorn, balayé en 2015. "L'entreprise et ses (640.000) salariés vont devoir faire face à des mois turbulents (...) nombre de managers vétérans vont perdre dans la restructuration", prédit le quotidien Süddeutsche Zeitung. "La reconstruction sera douloureuse, car elle a été sans cesse repoussée. Au final l'escroquerie sur les émissions des véhicules Diesel aura eu du bon : sans la pression de cette crise, rien n'aurait changé", poursuit-il.
Toujours est-il que M. Diess doit clarifier sa vision. S'il promet d'investir dans les nouvelles technologies, il martelait encore en mars que "nous avons besoin du diesel, le diesel a un avenir". Les constructeurs allemands se battent actuellement avec le gouvernement pour éviter l'instauration d'interdiction de circulation des diesels dans de nombreuses villes en raison du niveau de pollution au NOx supérieur aux normes européennes.
Si celles-ci devaient être introduites, le secteur, moteur et fierté de l'économie allemande, risque des pertes astronomiques. Déjà, la proportion de voitures diesel a baissé notablement ces derniers mois. Il ne représente que 31,4% des ventes début 2018, contre encore 45% en début de l'année dernière.
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