Climat: l'accord de Paris encore loin de prendre vie

  10 Mai 2018    Lu: 2040
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Encore loin du compte: les quelque 200 pays réunis jusqu'à jeudi à Bonn ont peiné à avancer vers l'objectif de donner vie à l'accord de Paris sur le climat, se fixant même une séance de rattrapage en septembre.

Le pacte climatique de 2015 vise à contenir le réchauffement mondial sous les 2°C, voire 1,5°C, par rapport à l'ère préindustrielle.

Mais pour pouvoir entrer en application en 2020 son mode d'emploi doit encore être élaboré: les règles et procédures pour mesurer et évaluer les engagements des Etats à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre.

Que comptabiliser dans les actions climat? Comment en rendre compte? Quelle flexibilité accorder aux pays en développement pour appliquer ces règles? 

Les pays du Nord doivent-ils offrir plus de "prévisibilité" à ceux du Sud qui ont besoin des milliards promis pour mettre en place leurs politiques climat?

Ces questions sensibles doivent être résolues au plus tard lors de la 24e Conférence climat de l'ONU (COP24) en décembre à Katowice (Pologne).

Mais pendant ces dix jours de négociations débutées le 30 avril en Allemagne, le travail a été "très lent", a résumé Amjad Abdulla, représentant du groupe des petites îles.

Une lenteur qui a douché les espoirs de disposer dès maintenant de projets de textes suffisamment ramassés pour pouvoir être réellement négociés.

"Nous ne sommes pas parvenus à ça, loin de là (...) Nous n'avons pas été à la hauteur de ce qui était espéré", a indiqué à l'AFP la négociatrice de l'UE Elina Bardram, évoquant une certaine "frustration" parmi les délégations.

La présidence fidjienne de la COP23 a donc annoncé une session additionnelle début septembre à Bangkok pour augmenter les chances de faire de cette année cruciale un succès.

L'apparente technicité des discussions ramène en réalité le plus souvent aux tensions récurrentes entre pays du Nord et du Sud et au nerf de la guerre, l'argent.

- "Le temps presse" -

Les pays développés se sont engagés à porter d'ici 2020 à 100 milliards de dollars par an le soutien aux politiques climatiques des plus pauvres, pour qu'ils puissent s'adapter aux impacts dévastateurs du changement climatique et eux-aussi réduire leurs émissions de CO2.

"Le silence radio sur l'argent fait craindre aux pays pauvres que leurs partenaires plus riches ne soient pas sincères concernant leurs promesses", a commenté jeudi Mohamed Adow, de l'ONG Christian Aid.

Des inquiétudes d'autant plus grandes que le président américain Donald Trump "a causé des dégâts énormes sur le front de la finance climat" en coupant certaines aides en parallèle au retrait annoncé de l'accord de Paris, estime Alder Meyer, observateur de longue date des négociations.

Alors le Premier ministre fidjien Franck Bainimarama a de nouveau plaidé jeudi pour un accès "plus facile" aux sources de financement. 

Au-delà de l'argent, il a également appelé à plus d'ambition dans la lutte contre le réchauffement, alors que les engagements nationaux actuels des signataires de l'accord de Paris conduiraient à un monde à +3°C, avec son lot annoncé de sécheresses, d'ouragans et de territoires submergés par l'augmentation du niveau de la mer.

"Avec le temps, des milliards de personnes supplémentaires vont se retrouver en première ligne (...). Le temps presse: s'il vous plaît, faites preuve du leadership dont le monde a désespérément besoin", a-t-il lancé aux délégués.

Beaucoup espèrent que le dialogue politique --baptisé Talanoa-- lancé par les Fidji sera une opportunité pour les Etats de montrer d'ici la fin de l'année qu'ils sont prêts à faire plus contre le réchauffement.

Mais "ce n'est pas réaliste d'espérer qu'il y ait à Katowice une avalanche d'annonces d'ambitions relevées", a tempéré Elina Bardram.

Alors que certains observateurs s'inquiètent du fait que cette cruciale COP24 soit présidée par un pays où le charbon est la base de la production électrique, Varsovie a annoncé avoir invité pour le début de la réunion le 3 décembre les chefs d'Etats et de gouvernement.

Ce sommet sera "un signal politique fort, il nous aidera (...) à parvenir à une conclusion positive", a assuré le négociateur polonais Tomasz Chruszczow.


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