«Chernobyl»: Le chef d'oeuvre de HBO fait la fusion entre fiction et vérité historique

  07 Juin 2019    Lu: 1348
  «Chernobyl»:   Le chef d

Tiendrait-on la meilleure série de l’année ? De tous les temps ? Chernobyl de Craig Mazin (Scary Movie 3 et 4, Very Bad Trip 2 et 3) est la série télévisée la mieux notée sur IMDBavec un score de 9.7/10. Elle dépasse Game of Thrones (desolée les dragons) et Breaking Bad, respectivement notées 9,4 et 9,5. L’exceptionnelle mini-série qui consacre cinq épisodes très documentés à la catastrophe nucléaire de Tchernobyl -comme son nom l’indique- a diffusé son dernier épisode lundi dernier.

La série surmonte l’écueil de la sévérité de son sujet – le plus grave accident nucléaire du XXe siècle- en insufflant un climat de tension aussi étouffant qu’inspirant. La précision de la reconstitution des événements, narrés heure par heure, des décors des descriptions du mode de vie des Soviétiques des années 1980 mettent le spectateur en condition (quasi) réelles. Le créateur Craig Mazin a d’ailleurs publié un thread sur Twitter dans lequel il dévoile la bibliographie qui l’a aidé à rester au plus près de la vérité historique. Et le résultat est stupéfiant, mais on en ressort avec l’envie irrépressible de savoir ce qui appartient au réel et ce qui a été romancé. Et, en effet, des petits éléments de fiction se sont invités ici ou là.

Un personnage inventé

Les personnages, d’abord. La physicienne nucléaire Ulana Khomyuk, campée par Emily Watson, est une pure invention. Elle officie aux côtés de Valery Legasov, interprété par Jared Harris, physicien nucléaire qui a dirigé la commission d’enquête sur les causes et qui s’est suicidé deux ans après l’explosion. Ce dernier, au cœur de l’intrigue de Chernobyl, n’était en réalité pas le seul scientifique soviétique à avoir alerté immédiatement les dirigeants et à, ensuite, gérer la catastrophe sur place.

« J’ai connu, par exemple, un autre chercheur, membre de l’Académie des sciences de Biélorussie, qui travaillait sur un projet de centrale nucléaire mobile, se souvient Galia Ackerman, historienne spécialiste du monde russe et autrice de Traverser Tchernobyl(Premier Parallèle). Il a également été mobilisé dès les premiers jours de la catastrophe pour participer à l’évaluation. » La série a d’ailleurs créé le personnage d’Emily Watson pour « représenter et honorer l’engagement de [dizaines de scientifiques qui travaillèrent sans relâche aux côtés de Legasov] pour la vérité et pour l’humanité », confirme un texte diffusé à la fin du dernier épisode.

« Legasov se sentait coupable parce qu’il appartenait à cette époque qui croyait dur comme fer en l’infaillibilité des centrales soviétiques et en l’infaillibilité du réacteur », analyse Galia Ackerman qui tente de donner une explication à son suicide. La série montre bien l’incrédulité des ingénieurs sur place et leur incapacité à concevoir qu’une explosion ait pu se produire alors même que des morceaux de graphite sont retrouvés par terre, brûlant à mort l’un des pompiers qui s’est risqué à s’en approcher. En effet, le graphite joue un rôle de modérateur, il est chargé de ralentir la vitesse des neutrons dans le réacteur. Sa présence à l’extérieur du réacteur est la preuve de l’explosion.

Un niveau de radiation était incompatible avec la vie

« Les ingénieurs sur place et la direction de la centrale présumaient que le réacteur RBMK qui a explosé était un type de réacteur aussi sûr qu’un samovar, évoque l’historienne. Ils ont donc envoyé des techniciens dans la salle des machines en pensant qu’il s’agissait d’un problème mécanique au niveau des turbines ». Ils ont été envoyés à la mort certaine, car le niveau de radiation était incompatible avec la vie. De même, les premiers pompiers sur place n’ont pas survécu. Mais tout le monde n’a pas péri, prévient Galia Ackerman : « Ont péri ceux qui étaient dans certaines salles ou qui se sont occupés d’éteindre l’incendie. » Les gens qui se trouvaient en périphérie de la centrale dans des lieux confinés ne sont pas morts.

Mais devant Chernobyl, on peine à comprendre pourquoi les mineurs, appelés à creuser un tunnel pour refroidir la dalle de béton du réacteur et apparemment conscients des dangers, ont accepté le risque de périr. « Ils avaient une conscience partielle, explique la spécialiste de Tchernobyl. Ils savaient que c’était dangereux mais comme c’était inédit, ils ne savaient pas à quel point ». Le patriotisme soviétique et l’esprit de sacrifice ont également joué un grand rôle dans leur dévotion. Mais surtout, aider à arrêter la propagation de la contamination nucléaire, pour certains, était une manière de défendre leur maison et leurs enfants.

Malgré l’enquête menée par les scientifiques, il est encore difficile d’en tirer des enseignements. « A ce jour, il y a des témoignages divergents sur le déroulement exact et les causes de la catastrophe », conclut Galia Ackerman. Si un jour, les scientifiques arrivent à un consensus sur le sujet, il y aura peut-être alors une saison 2 à Chernobyl.

20 Minutes


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