Le maître britannique du roman d'espionnage, John le Carré, est décédé à l'âge de 89 ans

  14 Décembre 2020    Lu: 913
Le maître britannique du roman d John le Carré en janvier 2020 en Suède Claudio BRESCIANI / TT News Agency / AFP

John Le Carré avait accédé à un succès international après la parution de son troisième roman, L'Espion qui venait du froid (1964), qu'il écrivit à 30 ans, «mangé par l'ennui» que ses activités de diplomate à l'ambassade britannique de Bonn en Allemagne lui procuraient.

John le Carré, maître britannique du roman d'espionnage, est décédé à l'âge de 89 ans, a indiqué son agent ce dimanche 13 novembre.

«C'est avec une grande tristesse que je dois annoncer que David Cornwell, connu dans le monde sous le nom de John le Carré, est décédé après une courte maladie (non liée au Covid-19) en Cornouailles samedi soir, le 12 décembre 2020. Il avait 89 ans. Nos pensées vont à ses quatre fils, à leurs familles et à sa chère épouse, Jane», a indiqué Jonny Geller, PDG du groupe Curtis Brown, agence artistique basée à Londres.

Nous avons perdu une grande figure de la littérature anglaise», a-t-il ajouté, louant son «grand esprit», sa «gentillesse», son «humour» et son «intelligence».

John Le Carré avait accédé à un succès international après la parution de son troisième roman, L'Espion qui venait du froid (1964), qu'il écrivit à 30 ans, «mangé par l'ennui» que ses activités de diplomate à l'ambassade britannique de Bonn en Allemagne lui procuraient.

Le roman, vendu à plus de 20 millions d'exemplaires dans le monde, raconte l'histoire d'Alec Leamas, un agent double britannique, passé en Allemagne de l'Est. Son adaptation au grand écran, avec Richard Burton dans le rôle titre, marque le début d'une longue collaboration avec le cinéma et la télévision.

C'est dans les années 70 qu'apparaît au premier plan le héros favori de Le Carré, le timide George Smiley, souvent considéré comme l'archétype de l'anti-James Bond: rigide, paranoïaque mais à l'intelligence acérée, «il ressemblait à un crapaud. Court et trapu, il portait des lunettes à verres épais qui lui grossissent les yeux», le décrit l'écrivain dans «Chandelles noires» (1962).

La carrière de John le Carré comme agent secret avait été ruinée par l'agent double britannique Kim Philby qui avait révélé la couverture de nombreux de ses compatriotes au KGB. John Le Carré - David Cornwell, de son nom véritable - avait alors dû démissionner du MI6. Mais coutumier de l'auto-dérision, il confessera plus tard avoir été de toute façon un mauvais espion.

John le Carré, dont les livres occupent les têtes de gondole dans les aéroports du monde entier, était un homme jaloux de son intimité, préférant les falaises de sa maison en Cornouailles aux mondanités du monde littéraire.

Il y a quelques années, il avait engagé deux détectives dans l'idée de démarrer une autobiographie, les sommant de rassembler «un dossier» sur lui et sa famille, pour établir la vérité. «Parce que je suis un menteur, élevé pour ça, entraîné à ça par un service qui ment pour vivre» et réinventant constamment sa propre vie, dit-il leur avoir expliqué. Mais ils reviennent bredouilles.

Il se résout à l'exercice en 2016 avec la publication de quelques souvenirs dans Le tunnel aux pigeons. Il remonte ainsi à sa petite enfance pour expliquer la colère qui l'habite: né le 19 octobre 1931 à Poole, petite station balnéaire du sud de l'Angleterre, il est abandonné à 5 ans par sa mère à un père tyrannique doublé d'un escroc dont il fera le portrait à peine déguisé dans Un pur espion (1986). «Les gens qui ont eu des enfances malheureuses sont assez bons pour s'inventer eux-mêmes», aime-t-il à dire.

Dans son dernier roman, paru en octobre 2019, l'europhile John Le Carré dressait un portrait sans concessions du Premier ministre Boris Johnson dépeint en «porc ignorant» et qualifiait le Brexit de «folie».

Marié deux fois, il avait quatre fils et treize petits-enfants. En 2011, il avait légué toutes ses archives à la bibliothèque de Bodley fondée au début du XVIIe siècle à Oxford, où il étudia les langues dans les années 1950. (AFP)


Tags: culture  


Fil d'info